Maîtriser la valorisation d'une entreprise
Il est important de maîtriser la valorisation d’une entreprise dans le cadre d’un processus d’acquisition pour plusieurs raisons :
Maîtriser la valorisation de son entreprise permet d’identifier les facteurs qui exercent un impact positif sur cette valorisation et d’allouer les ressources de manière plus ciblée afin de maximiser la création de valeur. Ainsi, l’entreprise peut procéder à un screening de ses activités et décider d’investir ou désinvestir sur certains projets afin d’optimiser ses investissements et la génération des cash-flows présents et futurs.
Contrôler sa valorisation permet de mesurer les impacts des décisions stratégiques du Management et donc d’augmenter les chances de succès de la stratégie mise en œuvre. Cela permet d’accroitre le degré de résilience de l’entreprise tant en période d’incertitude que lorsque le développement opérationnel est opportun.
Via une allocation optimale des ressources envers les diverses activités, ciblée grâce à la valorisation, l’entreprise garantit la continuité de ses opérations et est en mesure d’ajuster ses décisions et sa prise de risque selon les conditions économiques auxquelles elle fait face. Ainsi, l’entreprise continue à générer du cash, et donc de la valeur, et s’assure de conserver sa compétitivité sur le marché.
La valorisation est le socle indispensable pour entreprendre toutes négociations auprès d’investisseurs ou partenaires financiers. Elle permet de définir les besoins financiers nécessaires, de négocier les termes et conditions de financements éventuels et enfin de rassurer quant à la pérennité et rentabilité de la société.
Appréhender la valorisation
Il existe de nombreuses méthodes permettant de calculer la valeur de son entreprise, chacune ayant ses propres avantages et inconvénients. De plus, le choix des méthodes de valorisation est généralement en corrélation directe avec le contexte de la valorisation.
Dans le cadre d’une cession ou d’une acquisition, la valorisation de l’entreprise sera principalement basée sur les résultats historiques de la société. En effet, ces résultats historiques permettent de valoriser le patrimoine détenu par l’entreprise et témoignent de la capacité de cette même entreprise à générer du profit. Du côté de l’acquéreur, un business plan prospectif sera généralement réalisé afin d’identifier les flux de trésorerie futurs que l’entreprise aura la capacité de générer. Ces projections financières permettront à l’acquéreur de déterminer le prix qui pourra être payé pour l’acquisition de la cible.
Dans le cadre d’une levée de fonds, on identifie généralement deux profils d’entreprises qui diffèrent selon leurs degrés de maturité. D’une part, on retrouve les sociétés matures qui recherchent des fonds pour refinancer de l’entreprise et, d’autre part, les sociétés plus jeunes qui recherchent des fonds pour financer leur croissance ou leur développement.
Dans le cas des jeunes sociétés qui visent le développement ou la croissance, cela n’a que très peu de sens de tenir compte des résultats historiques pour déterminer la valeur de l’entreprise étant donné qu’ils ne fournissent pas une image fidèle du potentiel futur de l’entreprise. Ce type de société, lorsqu’elle se trouve dans un processus de levée de fonds, sera donc valorisée sur base des projections futures réalisées dans le cadre d’un business plan prospectif établi par le Management, généralement accompagné par un cabinet de conseil.
En revanche, une société mature qui se trouve dans un processus de levée de fonds dans un but de refinancement de sa structure sera à la fois valorisée sur base de ses chiffres historiques mais également sur base d’un business plan prospectif. Les chiffres historiques permettront de valoriser le patrimoine constitué par l’entreprise depuis sa création tandis que le business plan prospectif réalisé dans le cadre du processus de levée de fonds aura pour but de démontrer l’impact des fonds levés sur l’activité de l’entreprise, sur sa structure de financement et ses flux de trésorerie futurs.
Éléments clés de la valorisation d'une entreprise
Afin de pouvoir mettre en place un rapport de valorisation de qualité, défendable auprès des différentes parties prenantes au deal, il est indispensable de travailler de manière approfondie sur les trois piliers suivants :
La base de toute valorisation repose sur l’exhaustivité et la qualité des informations financières et opérationnelles de l’entreprise. Ces dernières ont pour but de donner une image fidèle du déroulement des opérations et de leur bon fonctionnement. Le reporting est donc un outil indispensable pour piloter l’entreprise et pour communiquer auprès de toutes les parties prenantes étant donné qu’il permet de fournir des informations quant à la performance de l’entreprise.
Il s’agit d’un document indispensable pour mettre sous une lecture chiffrée la stratégie de l’entreprise, ses objectifs, ses investissements et ses ressources disponibles. Sa mise en place via l’analyse historique des comptes et via des projections financières sert d’amorçage pour développer les diverses méthodes de valorisation existantes. Il sert également à justifier de la pertinence de la mise en place d’une activité, d’un produit ou encore à convaincre de potentiels investisseurs.
La valorisation d’une entreprise n’est pas une chose certaine et unique. C’est la raison pour laquelle, sur base du business plan préétabli, divers scénarios sont construits. Ces derniers permettent d’intégrer différents facteurs endogènes ou exogènes venant influencer les activités et donc les cash-flows de l’entreprise. Cela a pour effet de considérer la valorisation de l’entreprise selon divers contextes et ainsi fournir une fourchette de valorisation. De manière générale, trois scénarios sont établis : Worst Case, Management Case et Best Case.
La valorisation d’une entreprise repose sur certaines hypothèses préétablies et sur l’analyse du marché dans lequel opère l’entreprise. Parmi les éléments venant influencer la valorisation de l’entreprise, on retrouve notamment le taux d’actualisation qui dépend à la fois des conditions de marché générales (Premium Market Risk, taux sans risque, …), de la situation de la société en elle-même (sa maturité, endettement, …) et du secteur dans lequel elle évolue. Un autre élément clé en ce qui concerne les données de marché consiste en l’analyse des transactions comparables qui permet de déterminer les coefficients multiplicateurs d’EBITDA, de Ventes, etc. Le contexte macro-économique de l’entreprise exerce donc un impact significatif sur sa valorisation.
Impact de la maturité vis-à-vis d’un processus M&A
Le niveau de maturité d’une entreprise vis-à-vis d’un processus de cession ou de levée de fonds exerce un impact significatif sur sa valorisation.
En effet, ce niveau de maturité engendre un impact sur la perception de valeur pour un acquéreur, un repreneur ou un investisseur potentiel. Selon toute logique, une société bien gérée et bien positionnée aura plus de valeur qu’une société qui présente des déficiences en matière de gestion et qui se trouve dans le « ventre mou » du marché.
Au sein du cabinet EKKOFIN, l’évaluation de la maturité d’une entreprise vis-à-vis d’une opération M&A est réalisée sur base d’une « Company Scorecard » sur laquelle sont évalués une série de facteurs inhérents à la gestion, au positionnement et aux actifs de la société. Parmi ces facteurs, on retrouve :
Positionnement sur le marché, perspectives de croissance, avantage compétitif, internationalisation, niveau de RSE, etc.
Structuration de l’immobilier, rentabilité des activités, cohérence du portefeuille de produits et services, synergies entre les activités, structuration de l’actionnariat, structuration des entités juridiques, etc.
Positionnement technologique, digitalisation, Recherche & Développement, automatisation, innovation, etc.
Dépendance commerciale et opérationnelle au(x) dirigeant(s), gestion des relations clients, « Business Development », gestion opérationnelle, supervision des collaborateurs, risques de litiges commerciaux, risque fiscal, résilience face aux crises, risque technologique, etc.
Niveau de reporting, gestion financière, présence et optimisation de l’ERP, contrôle interne, organisation du département financier, résultats financiers, gestion de la trésorerie, niveaux de stocks, parc machines, état du bilan, ratios de solvabilité, etc.
Culture d’entreprise, taux de rétention, turnover du personnel, organisation des équipes, gestion des ressources humaines et du département RH, perspective d’évolution, team building, middle management, communication interne, polyvalence des collaborateurs, etc.
Agence marketing en interne, branding, digital marketing, « Community Management », veille concurrentielle, etc.
Diversification de la clientèle, qualité de la clientèle, organisation du département commercial, pouvoir de négociation chez les clients et les fournisseurs, etc.
L’entreprise est analysée en profondeur sur base de ces différents facteurs. Chacun de ces facteurs est évalué de manière à obtenir un certain niveau de maturité vis-à-vis d’une potentielle opération de cession ou de levée de fonds. L’impact de cette évaluation sur la valorisation de l’entreprise est significatif en ce sens que cela influence à la hausse ou à la baisse les valeurs moyennes.
À titre d’exemple, si l’entreprise est active dans un secteur où les multiples d’EBITDA de marché se situent autour de x6 et si celle-ci présente des déficiences notables en matière de gestion, de positionnement ou de santé financière, elle sera alors plutôt valorisée à x4 ou x5. À l’inverse, une société qui se trouverait dans une situation favorable en matière de performances financières ou de positionnement ou encore qui présenterait un niveau élevé en matière de gouvernance serait plutôt valorisée à x6 ou x7,5.
Par ailleurs, bien qu’il faille toujours garder à l’esprit la valorisation, il est impératif également de bien évaluer la probabilité de succès d’une cession ou d’une levée de fonds. Une société bien gérée et bien positionnée par rapport au marché et à ses concurrents augmentera fortement la probabilité de réussite d’une opération de cession ou levée de fonds.
Cela illustre parfaitement bien le postulat qui consiste à dire que le niveau de maturité d’une société vis-à-vis d’un processus M&A peut augmenter considérablement la valeur pour un investisseur ou un acquéreur potentiel et les chances de succès d’une opération.
Méthodes de valorisation
Comme mentionné précédemment, la valorisation d’une entreprise peut être déterminée selon deux approches distinctes :
1° L'approche historique
La première approche consiste à tenir compte des données comptables historiques pour évaluer la valeur actuelle de l’entreprise. Cette méthode peut se fonder sur l’analyse de ratios financiers (rentabilité, liquidité, solvabilité, etc.), sur l’analyse des marges ainsi que sur la comparaison de la performance de l’entreprise avec ses concurrents. Parmi les approches les plus connues, nous pouvons mentionner les deux suivantes :
Cette méthode réside à évaluer séparément les éléments de l’actif et du passif dans le but d’obtenir l’actif net réévalué de l’entreprise, c’est-à-dire les capitaux propres détenus par l’entreprise augmentés des plus-values latentes éventuelles. L’évaluation de ces éléments permet ainsi de dégager des valeurs parfois différentes de celles comptables.
Moyenne des EBITDA historiques de la société (éventuellement normalisés si besoin) multipliée par un coefficient de marché. Le résultat obtenu est diminué de la dette nette pour obtenir la valeur d’activité de la société. Cette méthode permet de valoriser la performance opérationnelle de l’entreprise.
Détermination de la valeur de l’entreprise en multipliant les ventes historiques par un coefficient multiplicateur déterminé sur base de données de marché. On actualise ensuite le résultat obtenu suivant le taux d’actualisation basé le marché et sur la structure de financement de l’entreprise valorisée.
2° L'approche prospective
La deuxième approche consiste à tenir compte des projections financières afin d’évaluer la valeur future de la société. Cette méthodologie vise donc à scénariser les projections financières de l’entreprise en question en y incluant des données économiques, sectorielles, de marché et également selon la stratégie de cette dernière. Parmi les méthodes les plus utilisées, on retrouve les trois méthodes suivantes :
Détermination des flux de trésorerie futurs attendus de l'entreprise auxquels on applique un taux d'actualisation pour obtenir la valeur actuelle de ces flux de trésorerie.
Semblable à la méthode « DCF », détermination des EBITDA futurs attendus de l'entreprise auxquels on applique un taux d'actualisation pour obtenir la valeur actuelle de ces EBITDA futurs.
Détermination de la valeur de l’entreprise en multipliant les ventes projetées dans le cadre du business plan par un coefficient multiplicateur de marché. Le résultat obtenu est alors actualisé suivant le taux d’actualisation basé le marché et sur la structure de financement de l’entreprise valorisée. marché et sur la structure de financement de l’entreprise valorisée.
Il est important de noter que la valorisation d’une entreprise peut s’avérer hasardeuse et fortement influencée par de nombreux facteurs. C’est pourquoi la valeur déterminée doit découler de la confrontation de plusieurs méthodologies (historique et prévisionnelle) afin de fournir une fourchette de valorisation la plus précise possible.